Le Burundi replonge dans l’urgence alimentaire

octobre 8, 2025

La courbe de la faim grimpe au Burundi, sans que la réponse internationale ne suive la même trajectoire. Dans un contexte d’instabilité économique et climatique, le pays des mille collines voit sa sécurité alimentaire s’effriter mois après mois. Aujourd’hui, une personne sur dix y fait face à une situation d’insécurité alimentaire aiguë, et les prévisions pour la fin d’année accentuent une inquiétude déjà palpable.

Une crise aiguë qui s’installe durablement

Les chiffres sont sans appel : plus de 1,17 million de Burundais, soit environ 10 % de la population, vivent en situation d’insécurité alimentaire aiguë selon le système de classification IPC (Integrated Food Security Phase Classification), correspondant à la phase 3 de crise. Et les mois à venir ne s’annoncent guère plus cléments : entre octobre et décembre 2025, ce chiffre pourrait bondir à 1,8 million, touchant ainsi 15 % de la population.

Plusieurs facteurs convergent pour expliquer cette dégradation rapide. Dans les provinces orientales, en bordure de la Tanzanie, les récoltes sont compromises par une combinaison de conditions climatiques défavorables, d’inondations récurrentes autour du lac Tanganyika, et d’une inflation persistante qui rend les denrées de base inaccessibles pour une large partie de la population. À cela, s’ajoute une dépréciation du franc burundais, qui pèse lourdement sur la capacité des ménages à acheter leur nourriture quotidienne, notamment dans les zones rurales où les échanges transfrontaliers sont devenus plus compliqués.

Une réponse humanitaire sous pression

Face à cette détérioration rapide, les efforts humanitaires sont à la peine. Entre janvier et juin 2025, près de 294 000 personnes ont reçu une assistance grâce au Programme Alimentaire Mondial (PAM), à la FAO et aux mécanismes mis en œuvre par le gouvernement. Toutefois, cette aide reste très en deçà des besoins estimés pour répondre à l’urgence croissante.

Les contraintes budgétaires touchent également les bailleurs de fonds, dont les financements s’essoufflent dans un contexte mondial marqué par une multiplication des crises humanitaires. Cette situation réduit la capacité de réaction des partenaires traditionnels du Burundi, et rend les campagnes de distribution de vivres et les transferts monétaires moins fréquents et moins étendus qu’auparavant.

Malgré cela, les projections indiquent une légère amélioration entre janvier et mars 2026, avec une population en phase 3 qui redescendrait à 1,14 million de personnes, soit 9 %. Cette stabilisation resterait fragile, dépendante des conditions météorologiques à venir, de la stabilité monétaire et de l’implication internationale.

La crise alimentaire qui s’intensifie au Burundi, c’est un miroir des limites des mécanismes de résilience dans les pays à faibles revenus confrontés à des chocs multiples. Si l’aide humanitaire apporte une réponse immédiate, elle ne saurait pallier à elle seule les défaillances structurelles d’un système agricole vulnérable et sous-financé. Le défi, désormais, est de penser une réponse qui articule urgence humanitaire, soutien à la production locale et renforcement des filets de protection sociale, sans quoi le cycle de l’insécurité risque de s’installer durablement.

Morgan Dossou

Journaliste passionné depuis une dizaine d'années, je m’intéresse aux grands enjeux de notre époque et à l’évolution du monde contemporain. Mon objectif est de proposer une information claire, fiable et accessible à tous, en mettant en lumière des sujets variés qui nourrissent la réflexion et favorisent une meilleure compréhension de l’actualité.

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