La Suisse restitue 24 millions d’euros à la Guinée équatoriale après la saisie des supercars de Teodorin Obiang

octobre 6, 2025

Presque dix ans après l’une des plus spectaculaires affaires de saisie de biens en Europe, la justice suisse boucle le dossier. Les 24 millions d’euros tirés de la vente des supercars de Teodoro Nguema Obiang Mangue, vice-président de la Guinée équatoriale, vont être restitués à l’État africain sous supervision internationale.

Des bolides hors du commun au cœur d’une enquête

Tout commence à Genève, en 2016. Les procureurs suisses ouvrent une enquête pour blanchiment d’argent visant Teodoro Nguema Obiang Mangue, surnommé Teodorin, fils du président de la Guinée équatoriale. Lors des perquisitions, ils découvrent un garage à la hauteur des plus grandes collections automobiles : 25 véhicules de luxe, dont plusieurs Ferrari, Lamborghini et Maserati.

Parmi ces voitures figurait une Lamborghini Veneno Roadster, modèle produit à seulement neuf exemplaires dans le monde. On y trouvait également une Ferrari Enzo, une LaFerrari et une 599 SA Aperta, des pièces rarissimes estimées à plusieurs millions chacune. Selon les enquêteurs, ces acquisitions auraient été financées avec de l’argent public détourné.

En 2019, après des années de procédure, la justice helvétique décide de mettre les voitures aux enchères sans prix de réserve. La maison Bonhams est chargée de l’opération au château de Bonmont, près de Genève. Une vente hors norme se prépare.

Une vente record suivie d’une restitution attendue

Lors de la vente, les collectionneurs affluent du monde entier. Les enchères s’enflamment rapidement. La Lamborghini Veneno Roadster s’arrache à 8,28 millions de francs suisses, établissant un record mondial pour la marque. La Ferrari Enzo dépasse 3,1 millions de francs, la LaFerrari franchit les 2,1 millions, et la Reventón Roadster atteint près de 2 millions. Même les modèles plus modestes trouvent preneur.

Au total, la vente rapporte 23,4 millions de francs suisses, soit environ 21,6 millions d’euros, bien au-delà des estimations initiales. À l’époque, la Suisse s’était engagée à reverser ces fonds « au bénéfice direct de la population équato-guinéenne ».

Six ans plus tard, cette promesse se concrétise. En septembre 2025, la ville de Berne annonce la restitution de 22,8 millions de francs suisses, soit un peu plus de 24 millions d’euros, à la Guinée équatoriale. L’argent sera affecté à un programme de coopération sanitaire, mené sous supervision internationale afin d’en garantir la transparence et l’usage effectif.

Une affaire emblématique aux résonances politiques

Cette restitution clôt un dossier emblématique de la lutte contre la corruption internationale. La Guinée équatoriale, riche en ressources pétrolières, demeure marquée par de profondes inégalités sociales. Le geste de la Suisse, salué par plusieurs ONG, symbolise une volonté croissante des États occidentaux de rendre les avoirs mal acquis à leurs pays d’origine, sous conditions strictes.

Pour autant, cette affaire n’a pas semblé freiner les goûts luxueux de Teodorin Obiang. Le vice-président continue de publier sur son compte Instagram des photos de voitures rares, comme une Lamborghini Centenario ou une Pagani, confirmant son image de collectionneur invétéré malgré les controverses judiciaires.

Un rappel sur la responsabilité internationale

En restituant ces fonds à la Guinée équatoriale, la Suisse envoie un message clair : les produits issus de la corruption n’ont plus vocation à dormir dans les coffres européens. Mais la véritable épreuve reste à venir, celle qui consiste à s’assurer que cet argent profite réellement aux populations auxquelles il est destiné.

Dans un contexte mondial de vigilance accrue sur la transparence financière, ce dossier rappelle que la restitution ne suffit pas sans mécanismes de contrôle et de suivi durable. Pour la Guinée équatoriale, ce remboursement n’efface pas les soupçons, mais il pourrait marquer le début d’une gestion plus responsable des richesses nationales.

Morgan Dossou

Journaliste passionné depuis une dizaine d'années, je m’intéresse aux grands enjeux de notre époque et à l’évolution du monde contemporain. Mon objectif est de proposer une information claire, fiable et accessible à tous, en mettant en lumière des sujets variés qui nourrissent la réflexion et favorisent une meilleure compréhension de l’actualité.

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